Le licenciement est une constante des sociétés développées actuelles, et le mouvement n’est certainement pas prêt de s’arrêter : la tendance actuelle est en effet de permettre une plus grande mobilité entre différents emplois et donc de rendre à la fois l’emploi et le licenciement plus faciles. Néanmoins, les gouvernements successifs ont considéré l’importance de fournir suffisamment de moyens à l’employé en CDI pour lui permettre d’effectuer une transition entre son licenciement et la reprise d’un emploi ou d’un projet professionnel. A ce titre, il est prévu des indemnités de licenciement spécifiquement calculées par la loi, fonction de votre ancienneté.

Découvrez les procédures et contours légaux de l’indemnité pour licenciement, des conditions pour pouvoir y prétendre et des différentes exonérations fiscales et légales.

Les principes généraux du licenciement : motif, ancienneté, situations particulières

Sous certaines conditions, comme le licenciement économique ou le licenciement pour faute simple, l’employeur est tenu de vous verser des indemnités légales, appelées indemnités de licenciement. A l’inverse de l’abandon de poste (ANCRE), qui ne bénéficie pas d’un cadre légal mais jurisprudentiel, le licenciement est strictement défini par la loi, particulièrement en ce qui concerne les motifs, l’ancienneté, les cas de force majeure ou la qualification du licenciement.

Les motifs légaux du licenciement

licenciement

Les motifs sont examinés afin de savoir s’ils correspondent bien aux cadres légaux prévoyant cette procédure, notamment au titre des articles L1234-9 à L1234-11 du Code du Travail. Le but est en effet de s’assurer que le salarié n’est pas l’objet d’une procédure de licenciement abusive, qui pourrait donc de facto le mettre en danger dans sa vie personnelle et professionnelle.

Le licenciement est possible sur la base de 2 motifs, eux-mêmes déclinables en une myriade de situations :

  • Le motif disciplinaire. Le salarié réalise une faute simple, grave ou lourde. La classification est établie officiellement, mais dépend des réalités ; la faute simple intervient lors d’une négligence professionnelle commise par le salarié, la faute grave correspond à une violation des obligations salariales (exemple : état d’ivresse, vol, harcèlement, abandon de poste…) tandis que la faute lourde correspond à la volonté de nuire à l’employeur (exemple d’une séquestration ou d’une dégradation volontaire).
  • Le motif non-disciplinaire. La faute repose alors sur les capacités professionnelle, physiques ou les volontés contractuelles du salarié, ainsi de l’incompétence pour les missions proposées ou le refus d’un salarié de changer de contrat.

Dans tous les cas, le licenciement doit être établi officiellement sur la base d’une « cause réelle et sérieuse », c’est-à-dire correspond aux trois critères suivants :

  • Doit exister dans les faits.
  • Doit être précise et vérifiable.
  • Doit disposer d’un degré de conséquence suffisamment élevé pour justifier qu’un terme soit mis au contrat de travail.

A noter que les motifs d’un licenciement peuvent officiellement être contestés devant le Conseil de Prud’hommes (voir la fin de notre article).

Le calcul et l’ancienneté

Tous les employés ne peuvent prétendre à des indemnités de licenciement ; en particulier, l’ancienneté est un facteur crucial pour déterminer si vous pouvez exiger ou non de telles indemnités, au titre des articles L1234-9 à L1234-11 du Code du Travail. Ainsi, vous devez être en mesure de prouver votre travail auprès d’un employeur pendant au moins 8 mois sans interruption. A noter que si votre ancienneté est inférieure à ce seuil, il est important de vous référer aux conventions collectives ou accords de branches et d’entreprise ; certaines dispositions prennent en compte le licenciement pour des salariés embauchés récemment.

Le licenciement pour faute simple, faute grave et faute lourde : puis-je bénéficier des indemnités légales ?

On a pu voir précédemment, dans les motifs, que le motif disciplinaire peut consister, fonction de la situation et des conséquences, en une faute simple, une faute grave ou une faute lourde. Selon la qualification de votre licenciement, toutes n’ouvrent pas un droit à l’indemnité légale.

Pour une faute simple, vous êtes autorisé à en bénéficier.

Pour une faute grave et pour une faute lourde, vous n’êtes pas autorisé à en bénéficier.

A noter qu’il s’agit là de dispositions légales ; encore une fois, il est important de vous référer aux conventions collectives, dispositions contractuelles et accords de branche et d’entreprise. Il est possible que certains accords prévoient des indemnités (souvent minorés) pour faute grave et pour faute lourde.

Les cas de force majeure : cessation ou dissolution de l’entreprise, décès du salarié

Certaines situations exceptionnelles donnent lieu à des variations quant au paiement ou non de l’indemnité légale de licenciement. La plupart du temps, ces dispositions sont fixées par la jurisprudence, mais il arrive également que certaines dispositions soient prévues par la loi. En voici les plus courantes :

  • Si le salarié faisant l’objet d’une procédure de licenciement, et pouvant prétendre à une telle indemnité, décède : l’indemnité est due est doit être versé aux ayants droit.
  • Si l’entreprise exécutant une ou plusieurs procédure(s) de licenciement effectue une cessation ou une dissolution de l’entreprise, l’indemnité est toujours due.
  • Si l’entreprise effectue une cessation pour cas de force majeure*, l’indemnité n’est pas due.

*Comment est défini la cessation « pour cas de force majeure » ?

La force majeure est assez floue juridiquement, mais elle doit tout de même répondre à 3 critères au titre des articles 1217 et 1218 du Code Civil, ainsi que des articles L1234-12 et L1234-13 du Code du Travail. L’évènement doit être d’origine extérieure, être imprévisible et être « irrésistible dans son exécution », c’est-à-dire inévitable. En cas de force majeure, l’employeur peut donc mettre immédiatement un terme aux contrats de ses employés, sans verser l’indemnité légale lorsque celle-ci est normalement due par la procédure.

Dans les faits, ce sont les juges qui examinent au cas par cas les motifs acceptables pour un cas de force majeure. La plupart du temps, ces évènements peuvent être de nature :

  • Naturelle : une catastrophe naturelle impacte de manière significative votre entreprise.
  • Administrative : l’agrément permettant d’exercer l’activité, là où il est requis, est suspendu, rendant de facto illégale la poursuite de l’activité.

Calculer le montant de l’indemnité légale en fonction de sa situation

calcul indemnités licenciementLes procédures et les motifs du licenciement ne sont pas les seuls à être fixés par la loi ; le montant de la prime de licenciement est la résultante d’un calcul défini par la loi, au titre des articles R1234-1 à R1234-5 du Code du travail, ainsi que de l’article L3123-5 du Code du travail pour l’alternance entre temps partiel et temps complet.

Le montant est déterminé en fonction de votre ancienneté : selon qu’elle soit inférieure ou supérieure à 10 ans, l’administration ne procédera pas au même calcul. Vous pouvez retrouver un tableau ci-dessous, accompagné d’exemples, vous permettant d’y voir plus clair fonction de votre situation.

Votre ancienneté est supérieure à 10 ans

Votre ancienneté est inférieure à 10 ans

Fonctionnement et mode de calcul

L’indemnité légale est calculée, pour les 10 premières années, sur la base du quart du salaire mensuel de référence par année d’ancienneté, et sur la base du tiers du salaire mensuel par année d’ancienneté au-delà de 10 ans.

 

Fonctionnement et mode de calcul

L’indemnité légale est calculée sur la base du quart du salaire mensuel de référence par année d’ancienneté.

Exemple 1

Si vous effectuez 12 ans en entreprise et que vous éligible à l’indemnité légale, pour un revenu de référence de 1500 euros, le calcul est de [(1500×1/4) x 10] + [(1500×1/3) x 2], correspondant au calcul pour vos 10 premières années d’ancienneté + vos 2 années supplémentaires.

Exemple 2

Si vous effectuez 3 ans en entreprise et que vous êtes éligible à l’indemnité légale, pour un revenu de référence de 1500 euros, le calcul est de [(1500×1/4) x 3].

Le cas des indemnités supra-légales : négociation et majoration automatique

On ne le dira définitivement pas assez au cours de cet article : il est crucial que vous vous penchiez sur les dispositions contractuelles et conventionnelles (la convention collective et les accords de branche et d’entreprise) de votre secteur ou de votre entreprise. Effectivement, les indemnités légales constituent une base minimale en-deçà de laquelle l’employeur ne peut pas aller ; cela ne signifie pas pour autant que la loi vous interdise d’obtenir davantage ! Ces dispositions ne sont en effet valides que si elles offrent un avantage par rapport à la base minimale légale, ce qui relève totalement de votre intérêt.

Vous pouvez alors procéder de deux manières :

  • La majoration automatique. Il s’agit des dispositions classiques qui prévoient des indemnités majorées ou supplémentaires (et d’une autre nature) pour le licenciement. Cela peut être le cas pour certains secteurs, en particulier pour un licenciement économique. Bien que ces dispositions soient économiques, prenez soin d’en vérifier la correcte exécution (voir fin d’article pour examiner vos recours).
  • La négociation. Via des entretiens avec votre employeur, vous pouvez essayer de négocier des avantages supplémentaires liés à votre licenciement.

Les exonérations de l’impôt et des charges fiscales et sociales

En théorie, les indemnités légales de licenciement restent soumises au paiement de certaines cotisations, comme la CSG et la CRDS, et le montant est censé constituer un revenu imposable au même titre que vos autres revenus. La loi prévoit néanmoins des dispositions spécifiques pour vous permettre de bénéficier d’une exonération sur le montant de l’indemnité pour licenciement.

L’exonération de l’impôt sur le revenu

Au titre de l’article 80 duodecies du Code général des impôts, vous pouvez bénéficier d’une exonération totale ou partielle de l’impôt sur le revenu de votre prime de licenciement si vous remplissez certaines conditions.

Si votre indemnité vous est versée au cours d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), alors celle-ci est automatiquement exonérée de l’impôt sur le revenu. Dans le cas contraire, elle peut être partiellement ou totalement exonérée, jusqu’à un certain seuil correspondant au montant le plus élevé des trois calculs suivants :

  • Le montant de l’indemnité légale ;
  • Le double de votre rémunération brute annuelle l’année précédente, dans la limite de 235 368 euros ;
  • La moitié de l’indemnité perçue, dans la limite de 235 368 euros.

L’exonération des cotisations sociales, de la CSG et de la CRDS

L’article L242-1 du Code de la Sécurité Sociale établit que vous pouvez disposer d’exonérations de cotisations sociales jusqu’à un certain seuil.

L’indemnité de licenciement est exonérée de cotisations sociales pour la partie qui n’est pas imposable sur le revenu, et dans la limite de 79 464 euros. Au-delà d’un montant de 397 320 euros, aucune cotisation ne peut être exonérée.

Vous bénéficiez également d’une exonération de la CSG et de la CRDS, jusqu’au plus petit seuil parmi les deux ci-dessous :

  • Le montant de l’indemnité légale ;
  • Le montant de l’indemnité exonéré des cotisations sociales.

Que faire si mon employeur ne remplit pas ses obligations contractuelles et légales ?

Vous l’aurez compris : les indemnités pour licenciement (hors faute lourde et faute grave) et leur montant sont strictement encadrés par la loi, ce qui signifie que votre employeur est tenu de répondre à ces injonctions, et de les mettre en application. Qu’il s’agisse du délai, des motifs ou du montant, si vous constatez une irrégularité, voire une fraude, il est important de prendre des mesures directement.

Les entretiens

La première chose à faire, si elle est possible, est de procéder à un nouvel entretien avec votre employeur si vous vous rendez compte après la signature officielle, ou de le mentionner lors de l’entretien préalable si vous arrivez à le remarquer à temps. Cela n’est certes pas toujours possible, notamment si le licenciement repose sur une faute simple ou des griefs personnels, mais elle permet d’éviter la voie judiciaire, plus longue et plus pénible. Elle reste néanmoins un incontournable pour vous assurer de faire valoir vos droits.

La voie judiciaire : les Prud’hommes

Les Prud’hommes sont constitués paritairement de juges non-professionnels issus du monde salarial et du monde patronal ; cela permet d’about à une bonne représentation des points de vue, et c’est notamment qui explique jusque-là pour le Conseil de Prud’hommes était considéré comme davantage en faveur du salarié. En revanche, ce Conseil compte désormais un magistrat chargé de faire respecter la procédure et les lois et ainsi d’éviter les décisions cassées en appel, qui se montaient à presque 50% en moyenne en 2017.

Avant d’entamer les procédures, n’hésitez pas à rechercher conseil autour de vous, et notamment auprès de vos collègues ou d’un représentant syndical, voire d’un avocat du travail si vos moyens le permettent. Ceux-ci seront plus à même de repérer s’il y a bien faute légale ou non, et de l’intérêt de vous rendre aux Prud’hommes.